Nextep rédige une tribune pour Le Quotidien du Médecin

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21/06/2016

« NEGOCIATIONS CONVENTIONNELLES ENTRE MEDECINS ET ASSURANCE MALADIE : LA REMUNERATION SUR OBJECTIFS DE SANTE PUBLIQUE MERITE UN PEU D’AUDACE ! » Un article rédigé par Nextep et consultable en ligne sur le site du Quotidien du médecin.

Le niveau et les modalités de rémunération des médecins constituent un enjeu structurant pour l’efficience d’un système de santé. Depuis 2011, la Rémunération sur Objectifs de Santé Publique (ROSP) a permis de diversifier les modes de rémunération des médecins libéraux via la mise en place d’incitations financières reposant sur des objectifs définis par l’Assurance Maladie. Après quatre années d’existence, le dispositif se trouve à la croisée des chemins. En effet, les négociations conventionnelles en cours entre médecins et Assurance Maladie sont l’occasion de donner un second souffle à cette logique de performance, contractuelle et innovante dans l’objectif de répondre à des besoins de santé publique. L’heure est à la réflexion sur les évolutions souhaitables qui permettront à la ROSP de s’imposer comme un levier de modernisation de notre système de santé.

Reconnaissons les succès de la rémunération sur objectifs. En quelques années, le mécanisme a largement contribué au vaste mouvement de modernisation des cabinets médicaux et d’amélioration des services aux patients, en témoignent la progression de l’informatisation des cabinets et de l’usage de logiciels d’aide à la prescription. Plus significatif encore, des progrès majeurs ont été observés dans la prise en charge des maladies chroniques, et notamment pour les patients diabétiques. Selon le dernier bilan de la Caisse Nationale d’Assurance Maladie, au terme de quatre années de déploiement, pas moins de 277 000 patients diabétiques supplémentaires ont bénéficié des dosages d’hémoglobine glyquée, recommandés par les autorités de santé, contribuant ainsi à une amélioration de leur suivi médical.

La ROSP n’en demeure pas moins perfectible. D’une part, elle peut être perçue par un certain nombre de praticiens comme un complément de revenus plutôt qu’un outil au service de l’amélioration des pratiques médicales. D’autre part, certains indicateurs n’ont pas été à la hauteur des objectifs. Ainsi, les indicateurs de vaccination contre la grippe saisonnière des personnes de plus de 65 ans, ou en situation d’Affection Longue Durée, sont trop restrictifs et n’atteignent pas les seuils fixés. Dans un contexte grandissant de défiance envers la vaccination, la ROSP n’aurait-elle pas un rôle crucial à jouer, en mobilisant médecins généralistes et spécialistes autour du renforcement de la couverture vaccinale, notamment auprès des populations adolescentes, adultes, ou souffrant de maladie spécifique, pour lesquelles le taux de vaccination est particulièrement faible? La création d’un indicateur encourageant le déploiement du carnet vaccinal électronique, à destination de tout médecin concerné par la vaccination comme les pédiatres et les médecins généralistes, pourrait fortement concourir à l’atteinte de cet objectif de santé publique majeur pour notre pays.

Alors quelles évolutions préconiser pour accompagner dans la durée les médecins dans l’amélioration de la prise en charge et du suivi des patients ? Les acteurs impliqués dans les négociations conventionnelles ont l’occasion de se mobiliser pour :

Une ROSP concentrée, permettant de focaliser les efforts des praticiens sur des priorités de santé publique définies par les autorités de Santé.

Une ROSP lisible, pour mobiliser les médecins sur l’amélioration des pratiques médicales et non sur des objectifs d’efficience ou d’organisation, méritant d’être valorisés par d’autres mécanismes.

Une ROSP dynamique, via la révision régulière des indicateurs permettant au dispositif d’être réactif quant au suivi et à l’atteinte des objectifs de santé publique.

Une ROSP corrélée, afin de pondérer les indicateurs entre eux et d’éviter d’en délaisser d’autres jugés moins « attractifs ».

Une ROSP coordonnée, qui valoriserait l’échange des différents professionnels de santé intervenant dans le parcours de soins de patients complexes, comme les pharmaciens et les infirmiers.

Une ROSP articulée, directement liée aux politiques de santé publique qui, pour être efficaces, ne peuvent se passer du concours des professionnels de santé, et notamment du médecin traitant.

Alors que les pouvoirs publics se remobilisent depuis des années pour lutter contre le tabagisme, première cause de mortalité évitable en France, ne pourrait-on pas inciter les médecins à s’impliquer dans des initiatives de sevrage tabagique ? La ROSP pourrait ainsi proposer des indicateurs valorisant le renseignement du statut tabagique du patient dans son dossier médical ; la délivrance d’un conseil à l’arrêt du tabac ; ou encore les demandes de remboursement de traitements d’aide au sevrage. Des médecins spécialistes des pathologies induites par le tabac, (pneumologues, tabacologues etc.) pourraient également être associés à ces dispositifs, en lien avec les médecins traitants.

Pour évoluer, la ROSP doit enfin moderniser sa gouvernance. Pour orienter avec justesse la mobilisation des médecins sur des enjeux de santé publique au plus près des besoins des territoires, les indicateurs de performance devraient pouvoir être adaptés aux spécificités démographiques et sanitaires régionales, en lien avec les Agences Régionales de Santé. Le dispositif gagnerait en pertinence s’il venait à être étendu à d’autres spécialistes, comme les pédiatres, les pneumologues, les cancérologues ou encore les néphrologues, dont les patients auraient également à gagner de l’amélioration des pratiques médicales. A l’heure de la démocratie sanitaire, l’Assurance maladie pourrait bénéficier de la participation d’acteurs pluridisciplinaires pour enrichir les indicateurs composant la ROSP. L’élaboration d’indicateurs adaptés nécessite la participation d’acteurs pluridisciplinaires tels que les sociétés savantes, le Collège de Médecine Générale, la HAS, ou les représentants des patients.

Prêtons-nous à rêver ! Pourra-t-on un jour imaginer un médecin traitant Lorrain, sur la base de prévalences régionales et sur proposition de l’ARS en concertation avec l’URPS et les associations de patients, être incité à dispenser des consultations dédiées à l’aide au sevrage des addictions de ses patients ? Pourra-t-il être encouragé à consolider la coordination avec les autres médecins intervenant auprès d’un patient complexe ? Une fois les bonnes pratiques mises en place, aura-t-il l’opportunité de s’engager sur d’autres indicateurs de performance ?

Cette illustration montre combien la ROSP est au coeur de la médecine de parcours et de territoire, que la dernière Loi de Santé a tenté de définir comme le nouvel horizon de l’organisation des soins. Pour y parvenir, assurément, l’évolution de la Rémunération sur objectifs de santé publique mérite un peu d’audace !

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