Le 9 Janvier 2018 – Entretien avec François Meyer, Directeur de la mission relations internationales à la Haute Autorité de Santé.

Le 9 Janvier 2018 – Entretien avec François Meyer, Directeur de la mission relations internationales à la Haute Autorité de Santé.

9/01/2018

« Prochainement, la Commission Européenne proposera un texte pour donner plus de moyens à cette coopération »
Aujourd’hui la coopération européenne utilisées pour les technologies de santé tend- t-elle vers une harmonisation des critères d’évaluation pour ses Etats membres ?
L’évaluation des technologies de santé a pour but d’éclairer la prise de décision en matière de prix et de remboursement. Il n’y a pas de pouvoir communautaire dans ce domaine, les politiques de santé sont décidées de manière indépendante par chaque Etat membre. La coopération européenne ne vise pas à amputer les Etats membres de cette liberté de décision, elle instaure en revanche un travail collaboratif d’analyse des données scientifiques. Ces évaluations fournissent aux décideurs de chaque Etat membre des informations objectives sur lesquelles se baseront les différentes commissions nationales pour produire leurs avis ou rapports.  Les décisions finales en matière de prix et de remboursement et les critères sur lesquels elles se basent restent de la compétence de chaque Etat membre.
Ainsi, en octobre 2012, une action conjointe nommée EUnetHTA JA2[1] a mobilisé une cinquantaine de partenaires de 28 pays sur une durée de 3 ans, permettant aux parties prenantes de collaborer sur le développement méthodologique et à la production des données nécessaires à l’évaluation des technologies de santé. En juin 2016 a démarré le projet EUnetHTA JA3, pour une durée de 4 ans.
La Haute Autorité de Santé joue un rôle important au sein d’EUnetHTA : elle produit des rapports d’évaluation communs et coordonne (Lead Partner) des rencontres précoces ou early dialogues entre les industries du médicament et d’autres agences HTA . Durant ces réunions, les industriels présentent et posent des questions précises sur leurs études cliniques (choix du critère de jugement, choix du comparateur…). Ces rencontres peuvent être faites en parallèle avec l’Agence Européenne des Médicaments. En novembre 2017, la HAS avait déjà reçu 14 demandes, 11 en parallèle avec l’EMA.
La coopération a-t-elle pour objectif à plus long terme de tendre vers une harmonisation des prix ?
Les décisions sur le remboursement et les prix des médicaments sont et resteront prises au niveau national et non européen. Il appartient aux instances nationales en charge de la fixation du prix des médicaments de décider si elles souhaitent engager une collaboration dans leur domaine de compétence. Auquel cas, l’existence d’un réseau fort d’agences HTA facilitera une telle coopération.
Des coopérations régionales se mettent en place comme celles regroupant les pays du Benelux et l’Autriche avec pour objectif de négocier conjointement les prix des médicaments avec les laboratoires pharmaceutiques. Cette coopération se fait sur la base du volontariat et n’est pas du tout dans le champ de la coopération européenne HTA.
Quelles sont les limites rencontrées dans le processus de coopération européenne ?
La coopération européenne en matière de produits de santé est forte car elle existe depuis plus de 10 ans. Cependant, elle souffre d’un manque de stabilité et de pérennité. Il n’existe pas à ce jour de secrétariat technico administratif permanent spécifiquement en charge de la coopération européenne en matière d’évaluation des technologies de santé.
Les financements sont actuellement limités, ce qui freine un développement plus important des rencontres précoces que l’industrie serait prête à financer s’il existait un cadre européen pérenne le permettant.

A la fin de l’année 2017, la Commission Européenne devrait proposer un texte pour assurer la pérennité de cette coopération en lui assurant les moyens de fonctionnement nécessaire.

Le système d’évaluation français a-t-il inspiré d’autres Etats membres ?
Le modèle français peut très bien convenir à certains pays comme l’Allemagne, qui s’est inspiré de l’ASMR pour faire du  critère de la valeur clinique ajoutée la base de son système d’évaluation. Depuis 2011, l’Institut pour la qualité et l’efficacité dans la santé[2], prend en compte la valeur ajoutée des produits de santé sans considérer explicitement les coûts liés au développement des médicaments et des dispositifs médicaux. Désormais en Allemagne, il existe 6 stades pour évaluer les bénéfices d’un médicament, allant de “Major additional benefit” à “ Less additional benefit”.
En parallèle, la France a su faire évoluer son système d’évaluation en prenant en compte l’évaluation de l’efficience des médicaments, critère inspiré par le modèle britannique. Ce critère introduit par la loi de financement de la sécurité sociale 2012 est appliqué depuis 2013.
Propos recueillis par Angela Vergeront 

 


[1]EUropean network for HTA Joint Action 2

[2] L’agence responsable de l’évaluation des technologies de Santé en Allemagne

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